Cette page requiert que JavaScript soit activé pour fonctionner correctement. / This web page requires JavaScript to be enabled.

JavaScript is an object-oriented computer programming language commonly used to create interactive effects within web browsers.

How to enable JavaScript?

Riposte à Honoré l’ancien – L'!NSENSÉ
Bienvenue sur la nouvelle scène de l'!NSENSÉ
illustration article

Riposte à Honoré l’ancien

——
Du Nouveau Roman de Christophe Honoré, donné dans la cour Saint Joseph, c’est moins ce que le spectacle montre et présente que je conserverai, que ce qui, à l’évocation d’un nom, d’un mot… se rappelait à la mémoire et au souvenir. Entre 22H00 et 1H45, il était ainsi possible à l’esprit de se faire buissonnier… et de s’acquitter de son droit de spectateur mécontent. Ou quand il n’est d’autre scène que celle de l’imaginaire afin d’éviter, un peu, la déception lorsque la caricature et le grotesque, loin d’être des qualités, réfléchissent à terme la mise en scène d’un procès.
Saint Honoré
Christophe Honoré pardonnera au rédacteur ce qui pourrait lui apparaître comme un jeu de mot blessant. A défaut de lever immédiatement l’ambiguité de cet intertitre, si Saint Honoré devait désigner Nouveau Roman, rappelant par-là que l’auteur et son œuvre sont pour partie toujours unis, cela reviendrait à laisser entendre la communauté ou la parenté que celui-là et celle-ci entretiennent avec la patisserie. Autant dire, dans la traduction accessible à tous, que Nouveau Roman procèderait d’une « Tarte à la crème ». Variation métaphorique du « Saint Honoré » qui aura le mérite de souligner immédiatement que si tarte à la crème il y a, c’est parce que Nouveau Roman se regarde comme une épreuve de plusieurs heures (qui se convertiront en éternité, quand la durée n’en finit plus d’entretenir avec la fin et surtout le propos : le différé). D’un mot déjà plus critique, le Saint Honoré se fondant sur le chou et la crème, avec Nouveau Roman, Christophe ferait chou blanc.
Peut-être parce que cette « patisserie » n’est en définitive, l’anagramme le souligne déjà, qu’une tapisserie. Patisserie et Tapisserie donc, alors que nous n’avons toujours pas levé l’ambiguité de notre propos.
A la métaphore culinaire qui renvoie de fait à un spectacle alimentaire (quelle estime lui conserver dès lors que l’on mesure ce qu’est la littérature définie par cet adjectif ?), succéderait celle qui nous inscrit, au mieux dans une forme d’art textile, au pire au rayon rouleau, à l’ombre des enseignes où les murs du Lycée Saint-Joseph partageraient avec « chantemur » une certaine idée de l’esthétique qui concerne cette fois : le raccord et le motif. Du « tarte à la crème », on entrerait alors dans un autre paradigme où il faut faire disparaître (c’est là un point crucial et une obsession chez le tapissier) le petit fil blanc qui menace toujours d’apparaître entre deux lés).
Notre ambiguité n’est toujours pas levée, il est vrai. Mais gageons que le « fil blanc » et l’expression qu’il convoque : « cousu de fil blanc » n’est pas sans nous rapprocher de l’espace littéraire où le « cousu de fil blanc » est au texte pour l’auteur, l’équivalent de la crème mal fouettée ou, pour le tapissier, la marque de l’expérience qui fait défaut quand l’espace entre deux lés est remarquable. Mais revenons à notre Saint Honoré qui, cumulant ici la famille des homophones qui rend voisin le lait et le lé, ne nous interdit pas des considérations plus littéraires quand le lai (petite forme poétique du moyen âge) nous rapproche du souci structurel en littérature, et donc au plus près du Nouveau Roman.
Evoquer Saint Honoré ici n’avait donc d’autres implications que d’inscrire Christophe Honoré au plus près de Sainte-Beuve, Saint Pivot, etc. C’est-à-dire, avouons-le, de rappeler qu’il fut un temps où le rendez-vous littéraire : qu’il soit celui des Salons du XVIIIème, celui des lundis que décria Marcel Proust (Contre Sainte-Beuve), des vendredis d’Apostrophe…participait ou se limitait à un interrogatoire de l’auteur où l’œuvre littéraire (c’est un rien pompeux tout ça, disons alors : le texte) ne s’appréhendait que par le prisme de l’intentionnisme et du biographisme.
Regardant et écoutant Nouveau Roman de Christophe Honoré, c’est cela, et c’était bien trop cela, qui aura été donné à entendre. C’est cette histoire des histoires biographiques qui aura été trop souvent le seul « motif » et l’enjeu des raccords de ce spectacle.
Soit l’image d’un geste de paparrazi où Christophe Honoré n’échappe pas au geste du videur clandestin des poubelles privées, et qui fait de Nouveau Roman une sorte de VSD (Voir Sans Développer). Une espèce scénique de Paris-Match où « le poids des mots, le choc des photos » aurait été converti, et fait de Nouveau Roman un programme weight watcheurs où, le sens au régime, c’est le lecteur/spectateur qui déprime.
Ecrivant ces lignes (féroces mais proportionnelles au sentiment de trahison, d’agression, etc), je ne dirais pas que Christophe Honoré a raté son spectacle. Loin de ne pas être distrayant, Nouveau Roman possède les qualités de ses défauts, à commencer par la légèrete qui peut suffire à entetenir le plaisir d’un festivalier venu en touriste. Loin de ne pas être divertissant, Nouveau Roman n’est pas sans intérêt, si l’on prête crédit à un geste qui privilégie l’impressionnisme ; et qu’une spectatrice, au prétexte d’un micro qu’on lui tend juste avant l’entracte, identifie comme une « soupe ».
Mais prétendre que Nouveau Roman rendrait compte du « groupe » du même nom serait injuste et omettrait de souligner ce qui nous semble relever, dans une régularité effrayante de multiples contradictions, du procès qui est mis en scène en forçant le trait grotesque.
Nouveau Roman
Est à l’image du commencement de ce spectacle, quand le frère de Christophe Honoré vient, en « prologue », faire un point biographique sur la vie de son aîné qui, du fin fond de son collège breton, découvre Duras alors que la lecture l’ennuie. Entre confessions intimes, jeu de mots et autres effets d’esprit, narration dilatée, inscription dans le récit monologué, désinvolture de circonstance,…Nouveau Roman aura été convoqué, en son entier, dans les trois premières minutes. La suite relèvera de ce geste augural où des comédiens, sur toute la surface du plateau qui occupe la cour, joueront à être, dans un rapport non-mimétique, Jérôme Lindon, Alain Robbe-Grillet, Claude Ollier, Nathalie Sarraute, Marguerite Duras, Michel Butor, Robert Pinget, Claude Mauriac, Claude Simon, Catherine Robbe-Grillet, plus tard Françoise Sagan…Personne, par choix de l’inégalable et du « Roi-Lear » qu’il était, ne pouvant prêter corps à Samuel Beckett qui, portrait-poster au mur dans ce que l’on suppose être le bureau de Minuit, est une apparition du vraisemblable.
Rôles qu’ils endossent, interchangeables avec celui de la meute de journalistes qui courent l’événement à l’occasion des distinctions et autres prix littéraires où la forêt des micros disséminés sur scène se trouve figurer les perches médiatiques du succès.
Un médicis, un Nobel (on nomme celui de Simon et pas celui de Beckett), un Renaudot, un Goncourt, une entrée à l’Académie Française aux pays des immortels…garantissant une entrée au Panthéon littéraire. C’est le choix de Christophe Honoré de saisir ainsi, pour partie, l’histoire du Nouveau Roman, à travers ces instants dont Thomas Bernhard, dans Le Neveu de Wittgenstein, rappelait que c’était le moment où l’on se « faisait chier sur la tête ».
Nouveau Roman tombe ainsi aux champs d’honneur, ou crêve (au sens de « dégonfler » dans la série du Vocabulaire) de ces repères qui ne renvoient à aucune filiation (génétique en littérature).
Privilégiant une dramaturgie de l’anecdote, au renfort de quelques vidéos qui convoquent les témoignages plus ou moins creux de commentateurs historiques ou médiatiques (c’est parfois la même chose), Saint Honoré canonnise ainsi les figures du Nouveau Roman en leurs vies intestines. L’agitation intellectuelle est alors mise en berne dans une mise en scène où les conflits intimes (amour, jalousie, obsessions, orgueil, rancoeur, etc…) forment l’essentiel d’un propos qui a fait le choix de rester dans l’attraction de l’Ego et qui, quand il s’en écarte, est rattrapé par un manque de prétentions (quelle lucidité, songe-t-on). De fait, Nouveau Roman ne prenant d’aucune manière part au débat qui concernait cet espace littéraire (l’allusion et le survol sont insuffisants), Honoré s’en tiendra à rappeler les ébats libertaires des auteurs de la rue de Palissy. Ou qui baise qui et comment ? « Baiser » ayant ici une valeur purielle qui renvoie aussi bien à la sexualité qu’à la manière de suvivre à la concurrence. Dans ce registre, les évocations de Catherine Robbe-Grillet restent pudiques. La confession vidéo de Pinget et de son homosexualité mièvres et beuglantes de pathos. Celle de Butor, de Sarraute… sans intérêt. On aurait préféré les mots du Castor (Beauvoir) sur ce sujet.
L’intérêt pour le cul (ça fait tourner le monde selon Queneau) n’y suffisant pas, Honoré s’attachera également à rendre les polémiques qui ponctuent les séances de travail d’un groupe qui n’était pas étranger à la mode des procès et autres auto-critiques de l’époque. Le mobilier, dès lors, recouvre toute son importance. Estrade, Bureau, chaise des inculpés…suffisent à rendre un tribunal littéraires. L’exclusion (à la mode de l’époque) marquait ainsi les limites de la dissidence par rapport à la doxa poétique. Arbitraires, sectaires, terroristes… les élites du Nouveau Roman apparaissent dès lors comme un clan armé des intentions les plus dogmatiques, voire fanatiques. Ce qui n’est pas sans lien avec une vérité historique, mais qui chez Honoré, s’apparente davantage à des comités de rédaction d’agences de com ou publicitaires. Ou comment organiser le scandale (interrogation de Sartre dans un Théâtre de situations) afin de gagner le paysage médiatique et la sphère égocentrique.
Un esprit chagrin aurait pu s’émouvoir du bidon bleu, apporté en front de scène, où l’on brûle les livres qui semblent figurer sur une liste noire. Image et geste d’autant plus troublants que, plus tard, à la récitation de La Route des Flandres de Simon, on convoquera l’Allemagne hitlérienne, les Nazis, etc.
(Dans un moment d’égarement critique qui n’est pas sans savoir qu’une part d’inconscient est toujours abandonnée dans l’œuvre, je me suis demandé quels liens pourraient être fait entre ces deux moments. Je me suis inquiété de la raillerie, de la moquerie constante qui s’exerçait sur les membres ridicules, risibles et fanatisés, ayant élu pour gourou ARG, et ce long temps où Honoré laissait place aux formes guerrières les plus brutales. J’aimerais une rencontre, avec Christophe Honoré qui, en conscience, est forcément étranger à ces lignes… En conscience dis-je ; quand l’œuvre parle une autre langue qu’il faut essayer de la dompter. Dire : « brûler les livres », comme c’est fait aussi, suffisait, non ?)
Du Manifeste des 121 à la gestion de la boutique Minuit, de l’évocation de Jean Ricardou à la rencontre de Cerisy-La-Salle, de la convocation de Roland Barthes à la bouille de Sollers sur fond d’écran, des allusions au cinéma de la nouvelle vague aux films d’auteur que furent Marienbad, Hiroshima mon amour, Moderato Cantabile, de la mélodie d’India Song (Lonsdale en mémoire)…jusqu’à l’énoncé qui fait de ce peuple qui parla une langue mineure les locataires du cimetière et autres rues, impasses, venelles et places municipales… Nouveau Roman n’a de cesse de papillonner ici et là, pour essayer d’approcher des auteurs, d’un éditeur (Ah, le liseret bleu sur fond blanc), et des questions que soulevèra chacune de ces œuvres singulières. Et de reconnaître alors, en friche, sans que Christophe Honoré ne parvienne vraiment à l’organiser, qu’il y avait dans cette mise en scène, une architecture. Architecture où le trio Auteur, Editeur, Lecteur servaient de fil rouge à la construction de Nouveau Roman qui glissera trop souvent vers un tissu de fil blanc. Ou une étoffe, inappropriée et mal confectionné, à l’image du costume endossé par le comédien, en bermuda, qui fait Alain Robbe-Grillet.
Un peu comme si Christophe Honoré, n’ayant pas trouvé les clés de son travail, s’inscrivait dans une distance qui le protégeait de la peur d’approfondir, d’y aller vraiment, de prendre le lieu de la scène pour ce qu’elle est : une marge exigeante qui n’a d’autres obligations que d’être l’espace d’expression de celui qui a quelque chose à dire, quelque chose auquel il tient et qui tient.
L’écriture blanche
Aux reproches vifs, au désaccord radical, la critique qui n’entend pas se défiler doit donc elle-même émettre une proposition sur Nouveau Roman. Comprenons bien, il ne s’agit pas ici de prétendre « re-faire » la mise en scène de Nouveau Roman, mais de chercher dans la proposition de Christophe Honoré les espaces d’un dialogue motivé par un thème, une approche, une forme. Dit autrement, par exemple, si le rappel de la « soupe aux poireaux » de Duras avait un intérêt dans le travail d’Honoré, c’est peut-être qu’il faisait écho à ce court texte de Robert Antelme « la soupe » qui évoque sa détention dans les camps. La question n’est pas, alors, de savoir pourquoi Nouveau Roman n’y fait pas allusion (les raisons peuvent être multiples), mais plutôt de comprendre pourquoi Christophe Honoré, au-delà de la fascination qu’il a pour le texte de Duras, a choisi de faire entendre ce texte sans le mettre en écho à celui d’Antelme.
Une des réponses pourrait être de rappeler ce que Barthes disait sur certains auteurs qui ne cherchent que « l’effet ». Soit des auteurs qui ne développeront aucune pensée, mais seulement des espaces sensibles éventuellement partageables. Des auteurs qui cherchent à faire un coup, en quelque sorte. Ce qui n’a rien à voir avec la théorisation du « coup de langage » chez Lyotard.
Bref, Nouveau Roman, procède du « coup » car il n’y a pas de pensée, mais des coups, des effets. Et disant cela, j’ai bien conscience que le dialogue ne sera pas facile à se mettre en place. Pour autant, dire qu’il n’y a pas de pensée (celui qui vous parle ne se prend vraiment pas pour de la « merde »), ne signifie pas qu’il n’y avait pas une arrière-pensée. Et disant cela, il me faut prendre le risque d’être « bêtement à côté ». Assumons le rôle de la critique donc, mais préalablement rappelons deux ou trois arguments sur le Nouveau Roman.
Tout d’abord, s’interesser au Nouveau Roman, c’est d’une certaine manière convoquer la Nouvelle critique. Et parmi les écoles de ce « mouvement » se souvenir que le structuralisme n’est pas étranger à un mode de fonctionnement littéraire où la question du sens et de la réception du sujet (lecteur) s’annulent ou, disons, sont renvoyés à des rôles de figuration. Ce qui compte désormais, c’est le fonctionnement du langage, les modes de construction de la signification, plutôt que le sens. Ajoutons que pour les auteurs du Nouveau Roman, leurs œuvres (Sarraute, Duras, Butor…) sont elles-mêmes des espaces de théorisation. Ou, et c’est fabuleux non, l’œuvre est elle-même sa critique.
Deuxièmement, Barthes l’aura avancé dans les années 1960, il s’agit de penser la mort de l’auteur. Définir le Nouveau Roman, c’est donc se passer de la figure auctoriale. C’est donc moins se priver de l’esthétique et de la poétique bourgeoise (crise du personnage, fin de la psychologie, abandon de la narration balzacienne et de l’application du schéma aristotélicien : debut, milieu, fin), que de se soustraire à l’emprise, l’empereur, l’auteur. Lévinas dira, après Barthes, « l’auteur reste au seuil de l’œuvre ». Les conséquences de cette proposition du client des deux magots auraient modifié notre manière de penser le livre à travers, seulement, le portrait de l’auteur (Honoré renverra à cette idée de « portrait » en convoquant les archives INA, sonores, de Duras qui ne se reconnaît pas dans le portrait).
Troisièmement, toujours pour Barthes, rappelons que « la littérature est une affaire posthume ». Un vague écho à la mort de l’auteur encore que ce posthume et un constat qui doit nous conduire au plus près de l’objet qui reste : l’écriture. L’objet du Nouveau Roman, c’est ainsi l’écriture.
Quatrièment, c’est Babar (sobriquet de Barthes quand Bernard Dort lui écrit) qui parle d’écriture blanche, en 1953, pour souligner la manière dont se manifeste les auteurs d’après-guerre, « écriture blanche » marquant une sorte « d’absence énonciative ».
Cinquièmement, sans qu’ils soient tous d’accord, les auteurs du Nouveau Roman refusaient l’explication, le commentaire et avouaient, comme le soulignera Sarraute, aimer l’idée de l’expérience intérieure pour le lecteur.
Sixièmement, la catégorie « Nouveau Roman » est un faux ensemble qui ne tient pas compte des singularités de chacun de ses membres, au même titre que « le théâtre de l’absurde » est aussi vide de sens.
Etc.
A partir de là, Le Nouveau Roman de Christophe Honoré ne pouvait plus que se fourvoyer dans l’espace historique et biographique, puisque l’espace conceptuel ou philosophique que développaient ses auteurs, l’invitait à : la mort de l’auteur, la fin de la narration tournée vers un dénouement, l’absence de figure d’autorité dans l’organisation du récit, etc. Entrer dans le détail biographique tel que le fit Christophe Honoré ne pouvait donc que mener à une impasse.
La question philosophique étant insoluble dans l’enjeu dramaturgique tel qu’il était posé, il aurait donc été plus aisé, soit d’abandonner le projet Nouveau Roman, soit d’en problématiser l’un des figures, et une seule, dans une lecture toute sobre.
Comme nous prétendons au dialogue constructif, on aurait encore peut-être pu faire Nouveau Roman à partir de la correspondance de cette fourmilière intellectuelle dont les archives sont nombreuses. Honoré se livrant à un travail de fourmi, aussi, par exemple à l’IMEC à Caen, aurait trouvé de quoi nourrir son propos….et peuplé d’images la scène
En guise de vidéo, quelques pages manuscrites des cahiers de Duras, et autres dessins de Pinget…. nous auraient rendu contemplatif d’une pratique d’écriture…qui ne se borne pas à l’alphabet organisé, mais aussi au dessin, aux croquis, etc.
Les fonds d’auteur n’y suffisant pas, ceux des éditeurs et notamment le beau livre d’Anne Simonin sur l’histoire des Editions de Minuit et de ses stratégies, auraient permis de comprendre quelque chose à ce travail d’archéologue et de découvreur…
Imaginons, un instant, que la scène aurait convoqué les « collections » de Minuit (Arguments, critique, Propositions, le sens commun…. c’est toute la vie et l’engagement des intellectuels qui auraient été présentés). C’est tout le combat de Maison (Minuit : la crise du récit et de la fable) à Maison d’éditions (Gallimard l’avocat des fables et du récit) qui aurait transpiré… etc.
Sans compter, devons-nous en parler ici alors que son ami Eric Vigner lui aura fait savoir, mais les auteurs du Nouveau Roman ne sont pas en reste avec le théâtre…
Mais Honoré n’est pas à cet endroit. Il en occupe un autre et c’est peut-être celui de l’arrière-pensée que nous évoquions. S’inscrivant définitivement dans la caricature, privilégiant le grotesque, allant jusqu’à parodier parfois la scénographie d’une Ecole des Fans ou un rendez-vous des alcooliques anonymes : leur lot de confessions et d’histoires moribondes… Honoré a délibérément choisi de se faire la peau du Nouveau Roman via le détail biographique de ses membres. Il y a là, à n’en pas douter, dans ce geste, une exécution. Ou disons un règlement de compte d’un auteur (Honoré) avec d’autres auteurs (pas des moindres). Alors risquons une interprétation. Et si Honoré en voulait à ceux qui ont défait la littérature de son socle fictionnel. Si Honoré, en définitive, s’en prenait à une forme de « postmodernité » qui a tenté d’en finir avec le plaisir du lecteur dans la reconnaissance et les histoires transposées. Quid de Beckett alors ?
Honoré, dans un geste qui frôle la contradiction, écrit un grand récit sans intérêt et raconte une histoire (ou tente de faire une fable avec des lambeaux de vie), là où les auteurs de Minuit y avaient, plus ou moins, radicalement ou épisodiquement, renoncé.
Et s’il n’y avait là qu’une querelle entre les anciens et les modernes. Honoré l’ancien s’en prenant aux modernes que sont les autres ?
Il est 1H45. Je m’éloigne. De retour en mémoire, un texte croisé dans les archives Robbe-Grillet, pendant les quelques mois où, à l’Institut mémoire édition contemporaine, je fouillais dans les archives de théâtre. Un texte de Robbe-Grillet, Pourquoi j’aime Barthes, publié aux éditions Christian Bourgois, en 1978. Un autre encore, d’Emmanuelle Lambert, (le dossier de presse de Les Gommes et Le Voyeur d’Alain Robbe-Grillet, 1953-1956), où elle rappelle l’importance du Prix Fénéon obtenu pour Les Gommes du « Pape du nouveau roman ».
Et retrouvant le sourire dans le désoeuvrement, un énoncé de Maurice Blanchot appris par coeur et extrait de l’Entretien infini : « l’écriture a cessé d’être un miroir ».
——