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Ma colombine… Omar Porras seul(S) en scène aux mondes – L'!NSENSÉ
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Ma colombine… Omar Porras seul(S) en scène aux mondes

Ma Colombine, texte de Fabrice Melquiot, mise en scène d’Omar Porras Au Gilgamesch.

De la rencontre de l’auteur Fabrice Melquiot et du comédien colombien qu’est Omar Porras est apparu Ma Colombine, un texte de Melquiot et une mise en scène signée par ce grand comédien à l’univers indéfinissable qu’est Porras que l’on retrouve au plateau. Soit une pièce ou un solo d’un peu plus d’une heure que l’on pourrait confondre avec un voyage onirique et ubuesque. Là, à l’endroit d’un théâtre des idées, des pensées, des imaginaires.

En fond de scène, dans un coin de la salle 2 du Gilgamesh, il y a une lune qui parle et que Porras appelle Madame la Lune. Dans son ombre, et qui commence à dessiner une diagonale, il y a un arbre magique, sans feuilles, il s’allume de lucioles de couleurs. Et au bout de ces deux points, dans le prolongement de cette ligne oblique, il y a un amas de rochers sur lequel Porras viendra parfois se reposer ou s’échouer. Et c’est dans ce décor, augmenté parfois de la précipitation de quelques poudres fantastiques, que Oumar Tutak Hijo de chibcha Vuelo de condor Suvan y Ven raconte sa vie ou son épopée qui l’a conduit de la Colombie à Paris, des bancs de l’école où il rêvait aux planches du théâtre où il donne à penser au public qui l’écoute avec l’attention des enfants à qui on raconterait une histoire fantastique.
Mêlant les langues espagnoles, à une gouaille de clown espiègle ; construisant un monde de chimères où sur le dos de son frère perchiste, d’un élan et d’un seul bond, il passe de Bogota à Paris ; se détournant de l’armée qu’il aurait fréquenté pour rire avant de devenir Clown ; discutant avec Friedrich Nietzsche alors qu’il feuillette les pages de La Naissance de la tragédie ; émigré latino qui fête et re-fête le bonheur d’être ;  etc. etc. Porras est un homme-orchestre dont les instruments s’appellent imagination, balourdise, mine de farceur, poésie, rêverie, tendresse, tristesse inattendue, joie d’exilé, plaisantin avec le public… Homme-orchestre qui unit toute ces qualités en une seule : l’acteur-poète, le Zarathoustra danseur, l’homme des arts et de Pachamama. Un poète, dis-je, qui a trouvé un abris au théâtre qui est le lieu de toutes ces vies fantasques, rêvées, imaginées… Là, où, à la manière de Borgès, il n’est plus aucune limite à l’imagination de la raison qui enfle et enfle de récits fantasmagoriques.
Et tout au long de Ma colombine, il y a cette phrase qui résonne « le monde n’est pas prêt pour la naissance d’un clown »… Phrase qu’Omar Porras répète à Madame la Lune, la confidente de ses secrets, lui qui s’amuse avec le public et, au final, alors qu’un portable sonne et qu’il s’agit du sien, apprend la mort de sa grande sœur. Moment où le clown qui fait rire, stoppe d’une parole nette, tous les rires pour faire place à un silence de plomb. Instant où l’accomplissement de son art est total. Où le rire et le grave reviennent s’embrasser comme au tout début, alors qu’il parle de l’Amérique du Sud, on songe en l’écoutant Aux Veines ouvertes d’Amérique latine d’Edouardo Galeano qu’il ne nommera pas, mais qui nous rappelle l’un des holocaustes les plus sanglants de notre histoire contemporaine.
Ce n’est pas seulement un numéro que livre Porras et ce n’est pas qu’un drôle de pistolet. C’est aussi un chroniqueur de son temps. Poète et chroniqueur, chroniqueur poète… C’est Porras.