HUSAIS
EXPRESS 2 TEMPS
Choregraphie : FATTOUMI Hela,LAMOUREUX Eric
Avec :
ZIANE Moustapha
ROUAIRE Philippe
CHESNAIS Marine
KAKLEA Lenio
Lieu : Centre Choregraphique National
Ville : Pantin
Le : 03 03 2009
© Laurent PAILLIER / photosdedanse.com
De Husaïs à Express 2 Temps : parcours d’un duo
Propulsés sur le devant de la scène de la danse contemporaine lors du concours de Bagnolet en 1990 avec Husaïs (prix SACD de la première œuvre), Héla Fattoumi et Eric Lamoureux opèrent aujourd’hui, au sein du CCN de Caen/Basse -Normandie, un retour à ce duo fondateur. A cette étape d’un parcours atypique, le couple de chorégraphes regarde par-dessus l’épaule et interroge le passé. Après 1000 départs de muscles (2007) dont le thème à résonance sociale interrogeait la place du corps dans nos sociétés occidentales et en particulier le mythe d’un corps idéal, magnifié et éternellement jeune, remettre Husaïs en chantier les ramène à l’intime.
Un texte de Christine Roquet maître de conférence en analyse du mouvement, Université Paris XIII, extrait de L’ici et l’ailleurs nº12.
Depuis 1988, vingt ans ont passé. Husaïs est pour le couple de chorégraphes un duo fondateur ; tout était déjà là, dira E. Lamoureux. Et en effet, le duo d’Husaïssème les cailloux qui baliseront leur parcours ultérieur : certaines figures-repères, certains gestes de prédilection (danse des mains, danse de dos), certains lieux du corps privilégiés (la nuque, les bras, les mains)…
Mais aussi et surtout apparaît là le germe d’une esthétique de l’ambivalence. Lisibilité du mouvement mais force souterraine des dynamiques, ritournelle musicale (donc continuité) mais usage de la syncope gestuelle, fuir le récit des affects mais charger d’intensité les regards, préserver la distance entre les corps mais danser à l’unisson… Si Husaïs fut construit à partir de l’alternance de gestes singuliers, insolites et difficiles à faire (E. Lamoureux), ceci ne constitua nullement un principe de composition immuable pour la suite des créations. Et bien que l’on y puisse relever quelques traits devenus récurrents -placer le mouvement au cœur de la composition, composer à partir d’actions, de situations, fuir toute psychologisation- le mode de composition s’élabore toujours chez les « Fatlam » en fonction d’un projet précis. Cette hétérogénéité de l’œuvre au prime abord, ce goût du « et ceci et cela », ce désir de ne pas choisir, à partir desquels ils tracent leur voie chorégraphique ne facilite pas l’approche théorique
Express 2 Temps répond donc au souci de transitivité (I. Launay) qui anime Héla Fattoumi et Eric Lamoureux, il ne s’agit pas pour eux de restituer ou de sacraliser le passé mais de le mettre en travail. En danse certes, on ne se souvient pas tout seul ; les chorégraphes ont d’abord passé tous deux, ensemble, par un temps de dé-tissage de la mémoire (tirer un fil puis un autre, au hasard, à partir d’une mosaïque de photos d’Husaïs) puis le travail en studio avec quatre interprètes de la compagnie fut l’occasion de re-tisser leur mémoire partagée. Du rappel inconscient d’un geste qui vient traverser le corps quand on ne l’attendait plus jusqu’à l’analyse d’un document vidéo aux fins de vérification, comme pour tout processus de « reprise » en danse, différents processus de remémoration furent mis en oeuvre . Quelle(s) aventure(s) se jouent-t-elles pour les chorégraphes-passeurs dans le fait de transmettre des gestes qui leur sont en quelque sorte ‘attachés ? Comment celui qui reçoit incorpore-t-il ce matériau ? C’est sans conteste la traduction de leur language dans le corps d’autres danseurs et surtout son extrapolation au travers de leurs gestes nouveaux (2ème partie) qui donnent sens à cette reprise, reprise qu’il conviendrait plutôt de nommer, à l’instar de S. Buirge : re-création à partir des éléments de base .