François Tanguy est mort ce 7 décembre 2022.
Il y a les peines muettes et les peines qui parlent. Ce sont les mêmes, et elles existent en même temps. On a parfois besoin de passer de l’une à l’autre. ça dépend souvent des heures quand on est maintenant un peu plus seul ou que le cercle des potes est de plus en plus troué.
Ce matin, j’ai appris que François a rejoint Walser, Pessoa, Brecht, Tchekhov, Dostoïevski, Mozart, etc. Je ne doute pas qu’ils vont devoir s’expliquer. La discussion s’annonce en fait. Comment Lui, le Tanguy, il a de leurs livres pressés des images. Oui, presser… comme on dit d’un Pressoir. Un théâtre pressé, c’est celui-là qu’il faisait François. Un théâtre sorti de la presse…
Bref, ça va s’expliquer dans la clairière. Faut l’imaginer le François en discussion avec ceux qu’il a pressés. Faut se laisser aller à écouter ce qu’il a tant de fois mis en avant dans la fonderie, chez les comédiens et les comédiennes qui venaient nous titiller le sensible.
J’aimerai, sans trop risquer ma peau, pouvoir entendre comment ils vont se causer. ça risque de se chahuter jusqu’à pas d’heure et pour l’éternité. Mais on sera pas là tout de suite. Enfin, on sera en retard… Y a des oeuvres comme ça qu’on devra rattraper.
De Tanguy, je garderai entre autres la manière qu’il avait, au moment de se dire « bonjour » ; la manière qu’il avait d’abord de vous sourire (un vrai sourire), puis de vous attraper à bras le corps. Avant de vous repousser et de vous prendre la tête dans ses deux mains (belles paluches que celles de François) et enfin, quand vous étiez là, pris dans cet étau affectif, la façon qu’il avait de vous regarder jusque dans le fond de la rétine. Instant où sans un mot, il vous rappelait qu’il vous reconnaissait. C’était quelque chose de se donner le « bonjour » avec François Tanguy. Ouai, une sacrée chose… et ça va me manquer beaucoup, terriblement en fait.